Récidive: l’administration Berset se moque ouvertement de la justice, de la santé publique et de la population Suisse

Permettre l'arrêt du tabac au mieux

Après sa défaite au Tribunal Administratif Fédéral (TAF), l’administration tente d’imposer des restrictions aux vapoteurs suisses à travers une interprétation absurde du jugement rendu. Ces restrictions, à la « bruxelloise », réduiraient la liberté de choix dans les produits de vapotage, outil de réduction des dommages, et favoriseraient le maintien du tabagisme, principale cause évitable de maladies en Suisse. Les intérêts des lobbys et des rentrées fiscales pour le Département de l’intérieur semblent prévaloir sur le respect de la justice et de la santé publique. Helvetic Vape, l’association Suisse des vapoteurs, s’inquiète de l’obstination de l’administration Berset.

Le verdict du TAF ne repose pas sur le principe de cassis de Dijon

Le verdict du Tribunal Administratif Fédéral (TAF) est des plus clairs: « Une décision de justice n’entraînera la nullité que dans des cas exceptionnels et s’ils sont graves[*]. En raison de sa défectuosité, la décision générale doit être révoquée ». La décision administrative de la prohibition de vente en Suisse des liquides de vapotage nicotinés a donc été abrogée par le jugement C-76347/2015 du TAF ce 24 avril 2018. « Étant donné que la décision administrative de l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) du 12 novembre 2015 doit être abrogée, il n’est pas nécessaire de poursuivre l’examen des objections du plaignant et de répondre à sa demande de jugement déclaratoire », précisent les juges de la cour de St.-Gall. 
Le TAF casse la prohibition du vapotage nicotiné en SuisseAutrement dit, l’argumentation autour du principe du cassis de Dijon invoquée par la défense des deux recourants – Stefan Meile d’Insmoke et Rico Daniel d’E-Smoking – n’a pas eut à être prise en compte pour rendre ce jugement. Le point est important puisque l’OSAV invente sa propre interprétation du jugement pour justifier de nouvelles restrictions à l’accès local aux produits de réduction des méfaits pour la population Suisse. « Avec la décision du Tribunal administratif fédéral du 24 avril 2018, les cigarettes électroniques contenant de la nicotine en provenance de l’UE, en se fondant sur le principe du Cassis de Dijon, peuvent désormais être commercialisées en Suisse », délire Judith Deflorin, responsable de la division ­Accès au marché à l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) dans un interview ce 4 mai au magazine de la Migros. A aucun moment, la cour du TAF ne se fonde sur le principe de Cassis de Dijon pour rendre son verdict et rien ne semble justifier d’imposer à la population Suisse les restrictions réglementaires dictées par les lobbys de Bruxelles. 

L’administration n’a pas compétence d’imposer n’importe quoi

Avec ces déclarations, l’administration se moque ouvertement de la justice en récidivant. Le TAF a abrogé la décision abusive de l’OSAV de prohiber la vente des liquides nicotinés de vape parce que, dans un régime démocratique tel que la Suisse, l’administration n’a pas compétence pour imposer n’importe quoi à la population au gré de ses lubies. Par une pirouette de langage, l’administration tente depuis 2009 de faire croire à une fantasmatique « unité fonctionnelle » pour amalgamer des produits aussi différents que les atomiseurs, les box, les batteries et les liquides de vapotage. « Le terme « e-cigarette » (cigarette électrique, cigarette électronique) n’est pas un groupe fonctionnel, puisqu’il ne s’agit pas d’un groupe d’articles formant une unité individuelle, mais un terme collectif couvrant tous les modèles d’e-cigarettes (cigarette électrique, cigarette électronique), y compris leurs cartouches et recharges (liquides) commercialisées séparément », relève le jugement du TAF. 
Avant de pointer l’abus de l’administration: « L’OSAV s’est abstrait de la catégorie de produit original « Liquides à 9 mg de nicotine » ou « Liquides pour e-cigarettes » et a choisi une formulation ouverte, élargissant ainsi de manière significative l’objet de la décision. L’objet de la décision « e-cigarette » (cigarette électrique, cigarette électronique) n’est pas déterminé individuellement et il n’est donc pas concret, mais abstrait ». « Il résulte de ce qui précède », poursuit le verdict du TAF à son point 3.6, « que la décision de l’OSAV a un cercle de destinataires et un objet de décision abstrait, la décision est devenu générale-abstraite au lieu d’être générale-concrète, de sorte que son contenu est devenu un décret au lieu d’une décision de portée générale. Pour cette raison, la décision générale contestée s’avère être une décision erronée », explique la Cour aux bureaucrates visiblement peu soucieux des problèmes de vices de forme dans leurs appétit d’imposer leurs intérêts à la population.
Des vapoteurs romands sauvés du tabagisme grâce à le nicotine

Quels enjeux?

L’OSAV tente de profiter de ce jugement, qui désavoue sa politique d’obstruction anti-vapotage, pour imposer de facto la réglementation européenne (TPD), dictée à l’UE en 2014 par Vilnius et la Valette. Que ce soit la Lituanie ou Malte, les deux pays sont passablement aux ordres de lobbys intéressés à maintenir le tabagisme en place. Ces restrictions auraient notamment pour conséquence de limiter la vente de liquides de vape nicotinés en fioles de 10 ml au maximum avec une concentration maximale de nicotine à 20 mg/ml. 
Le Conseil fédéral lui-même a souligné l’absurdité de la limitation européenne de contenance des fioles dans le rapport explicatif à son avant-projet de loi sur les produits du tabac et des cigarettes-électroniques (LPTab), publié le 8 décembre dernier pour consultation publique (voir les 1287 avis publiés hier sur le page de l’OFSP). Rendant les fioles plus facilement préhensiles pour les petits enfants, cette taille réduite augmente les risques d’accidents, cependant très rares, par ingestion accidentelle. Elle pousse surtout à une surconsommation inutile et polluante de contenants et augmente mécaniquement les coûts. Bref, une décision ridicule de bureaucrates européens sous l’influence de lobbys intéressés à entraver l’essor du vapotage.

Une interdiction d’arrêter de fumer pour 30% des fumeurs

De même et de manière plus critique pour la santé publique, la limitation à 20 mg/ml de nicotine est absurde et délétère. Pour le lecteur peu au fait, le contenu réel en nicotine d’une cigarette selon les normes en vigueur en Suisse (et dans l’UE) est compris entre 10 et 20 mg de nicotine – à ne pas confondre avec la mesure de la fumée dégagée par un certain nombre de bouffées lors des tests avec des machines à fumer, mesure encore indiquée sur les paquets en Suisse -. Pour environ un tiers des fumeurs, cette limite est trop basse pour réussir à arrêter de fumer à l’aide du vapotage. 
Avant l’entrée en vigueur de la transposition de la directive européenne TPD, près des deux-tiers des gammes de liquides en boutiques britanniques offraient des concentrations supérieures à 20 mg/ml. Depuis l’entrée en vigueur de la transposition de la TPD, la chute du tabagisme grâce au vapotage subit un fléchissement en Angleterre. A présent, une commission parlementaire étudie les modifications à apporter à la réglementation à l’occasion du Brexit. La révision de cette limite contre-productive est une demande des milieux de santé et des usagers britanniques. Cette limite en vigueur en France depuis 2011, avant même l’instauration de la TPD, est probablement une des clefs d’explication de la plus faible efficacité du vapotage contre le tabagisme que de l’autre côté de la manche.

Incitation à surconsommer

Outre que cette limite interdit en acte aux fumeurs les plus nécessiteux une aide pour sortir du tabagisme, elle favorise une surconsommation de liquide chez les vapoteurs. Comme déjà évoqué sur ce blog, les travaux de la Dr Lynne Dawkins montrent que les utilisateurs sous-dosés en nicotine compensent en consommant plus de liquide et ont tendance à augmenter la puissance de leur appareil. Le développement des liquides aux sels de nicotine permet à des fumeurs dont l’appareil respiratoire est inflammé par le tabagisme, d’inhaler des liquides dosés à 40, 50 voire 70 mg/ml de nicotine. Ce nouvel outil constitue une avancée de premier choix pour aider certains types de fumeurs à sortir du tabagisme. En interdire la vente, c’est condamner ces personnes à ne pas avoir le droit de sortir du tabagisme et des maladies qui lui sont liées. Il n’y a aucune justification éthique, sanitaire ni sociale à une telle mesure contre le droit à la santé.

La politique d’obstruction fédérale

La cigarette à Berset
Alors quelle peut être la véritable raison des services du Conseiller fédéral Alain Berset pour imposer ces restrictions stupides et morbides? Selon toute vraisemblance, la même qui les a conduit à prohiber en toute illégalité le vapotage nicotiné durant neuf ans. Judith Deflorin l’avoue à demi-mot dans son interview au magazine de la Migros. « Ce recours accepté par le Tribunal administratif fédéral constitue-t-il une surprise? », lui demande le journaliste, « Non, pas vraiment. L’ensemble du processus a pris deux ans et nous attendions la réponse du tribunal », reconnait la porte-parole de l’OSAV, qui savait donc que sa décision administrative n’était pas valable et allait être annulée par le TAF. Autrement dit, l’administration joue la montre depuis toutes ces années: gagner du temps pour permettre aux cigarettiers d’imposer leurs nouveaux produits marquetés « à risques modifiés » comme les référents sur le marché et imposer les normes européennes en Suisse.
Plus de 2,2 milliards FS. de rentrées annuelles grâce aux ventes de tabac dans les comptes du Département de l’intérieur d’Alain Berset, l’importance des cigarettiers aux sièges lausannois ou genevois, dont les produits ont été homologués sans études indépendantes préalables, ajoutés aux intérêts des monstres bâlois de l’industrie du cancer, dont 40% est assuré par le tabagisme… L’OSAV ne se moque pas seulement de la justice et
de la population en lui racontant des sornettes. L’administration d’Alain Berset se moque de la santé publique au profit de petits arrangements entre lobbys.

Que faire ?

Les indications du billet sur le site de l’OSAV ne sont que des indications sans statut juridique. Puisque ces indications n’ont pas de légalité, ne pas les respecter n’est pas un acte illégal en l’état. Le problème est évidemment que l’administration va tenter de « faire sa loi » pour créer une situation de fait avant même son projet d’assimilation du vapotage au tabagisme dans la loi Tabac (LPTab) – qui n’entrera pas en vigueur avant 2022 (voire plus tard…) -. Il semble impératif que les citoyens refusent une nouvelle période d’abus d’autorité illégal de l’administration après neuf ans d’obstruction contre le droit à la réduction des risques. Selon les données du monitorage officiel, plus d’un million de fumeurs suisses ont essayé le vapotage, mais sans pouvoir arrêter de fumer avec son aide faute de nicotine. 
Le bilan humain de l’administration est lourd, très lourd. La politique tabagique irresponsable et conservatrice du Conseiller fédéral Alain Berset en charge de ce département est inacceptable. Enfin, il serait bienvenu que le Tribunal Administratif Fédéral précise à l’administration la portée de son jugement pour couper court aux non-sens répandus par la porte-parole de l’OSAV à son propos. La bataille pour le droit à la réduction des risques avec le vapotage en Suisse n’est pas terminée…
[*] La décision du TAF mentionne la jurisprudence : cf. BGE 138 II 501 E. 3.1 ; BGE 137 I 273 E. 3.1 ; BGE 137 III 217 E. 2.4.3 ; BGE 136 II 489 E. 3.3 ; arrêts du BGer 9C_320/2014 du 29 janvier 2015 E. 4.1, 2C_596/2012 du 19 mars 2013 E. 2.1 et 2C_657/2014 du 12 novembre 2014 E. 2.2

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