La Ploom est-elle un produit vendu illégalement en Suisse ?

Pourquoi le produit Ploom de Japan Tobacco est-il autorisé à la vente en Suisse depuis quelques semaines? La question se pose dans le contexte de prohibition des produits de vapotage nicotinés par les autorités fédérales. En l’occurrence, l’interrogation est soulevée par Ric Daniel de la société Zodiak de Kloten. « Comment la Ploom est-elle classée? », demande le vendeur de produits de vapotage dans un courrier adressé au Service de la consommation de Genève que nous avons pu lire -[ Edit 10.09.2017: la lettre a été mise en accès public ]-. Sur son site, Japan Tobacco présente son produit  comme « une nouvelle façon vraiment simple de vapoter du tabac ». A quelle catégorie le produit « hybride » est-il soumis? Soit la Ploom est un produit de vapotage, considéré comme produit usuel par les services d’Alain Berset et donc interdit s’il contient de la nicotine. Soit la Ploom est une cigarette de tabac, autorisée sans problème avec ses dangers de santé inhérents et bien connus des autorités.
Nicotinée?
Tel un enquêteur, le vapoteur suisse-allemand a cherché à savoir si le produit de Japan Tobacco contient ou non de la nicotine. « Le liquide exempt de nicotine dans la cartouche crée de la vapeur », lit-on avec lui sur le site ploom.ch. La Ploom ne contient-elle donc pas de nicotine? Pas si sûr, même si l’information explicite est difficile à trouver, y compris sur l’emballage du produit. Les capsules contiennent en effet du « tabac de première qualité finement moulu », selon les mots du cigarettier. A moins qu’il ne soit dénicotiné, ce qui n’est pas indiqué, celui-ci en contient probablement. L’avertissement de santé réglementaire imprimé sur le packaging parait impliquer que le produit vendu est nicotiné.

Si les analyses confirmaient que ses capsules de tabac moulu contiennent de la nicotine, la Ploom ne devrait pas être autorisée a la vente en tant que produit de vapotage. Mais alors, peut-elle avoir le statut de produit de tabac? Pour cela, elle doit souscrire aux conditions de l’ordonnance les régissant (OTab). Or, l’article 5 de celle-ci spécifie les produits interdits. « Sont considérés comme tels [interdits] les produits présentés sous forme de poudre, de particules fines ou toute combinaison de ces formes (…) exceptés les produits destinés à être fumé ou mâché », énonce l’OTab. La Ploom s’annonce être destinée, ni à fumer ni à mâcher, mais à « vapoter ». Son tabac finement moulu non destiné à être fumé semble donc tomber sous l’interdiction.
Mortelle protection des cigarettes
L’Office fédéral de la santé publique interprète la loi sur les denrées alimentaires et les produits usuels et son ordonnance (ODAIOUs) comme une base légale pour interdire la vente en Suisse de produits de vapotage avec nicotine. Ce point de vue des autorités considére la vape comme un produit usuel entrant en contact avec les muqueuses et ne devant pas contenir de substances ayant effet pharmacologique (telles que la nicotine ou la caféine). A moins que les autorités fédérales ne fassent exception pour le cigarettier, au  siège à Genève depuis fin 2015, la Ploom semble devoir être interdite. Ceci  au moins jusqu’à la décision du Tribunal administratif fédéral (TAF) sur les deux recours contre la décision de prohiber le vapotage nicotiné pendants depuis novembre 2015.
Ric Daniel, en tant que vendeur de produit de vape, semble victime de concurrence déloyale dans la situation. « Je me sens concerné directement. En bref, j’ai l’impression de vivre dans une république bananière », s’agace le commerçant. Il s’interroge aussi sur la légalité du marketing santé développé par le cigarettier japonais. Le Service de la consommation genevois répondra t-il à ces questions?
La souplesse d’interprétation administrative
Avant lui, l’association des usagers Helvetic Vape avait déjà soulevé un lièvre similaire sur le deux poids, deux mesures des autorités subit par la vape en regard de l’industrie cigarettière. Pourtant, par principe de cohérence et égalité de traitement, l’interprétation des autorités de l’article de loi (ODAIOUs art. 37 §3) pour justifier l’interdiction du vapotage avec nicotine devrait aussi s’appliquer à des produits contenant nicotine ou caféine. Tels que cigarettes, à chauffer ou brûler, canettes de soda caféiné, etc… 

« Après l’élaboration hâtive de l’ODAIOUs, les produits du tabac sont soumis à l’article 37 de l’ordonnance. Le manque de réflexion de l’administration et son empressement à faire plaisir à l’industrie pharmaceutique conduit donc à rendre illégaux l’ensemble des produits du tabac. Mais personne, pas même la lutte anti-tabac, n’utilisera cet article pour faire interdire la vente des produits du tabac », expliquait un texte rétrospectif de l’association d’usagers en décembre dernier. Aucune réaction n’ava
it alors suivi de la part des autorités. 

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